Black coffee

Sophie Loubière - Pocket Univers Poche 2016


Bien que motarde, la route 66 ne figurait pas dans mes destinations de voyages rêvées et envisagées. Sophie Loubière vient de me faire changer d’avis avec son roman « Black coffee ».

Ce roman ne s’apparente pas franchement à un road movie, mais ce trajet mythique de Chicago à Los Angeles sert de cadre à une double intrigue. Autant dire que la référence à l’âge d’or de cette glorieuse route nous plonge dans une Amérique nostalgique, mais l’auteure n’en reste pas là et nous fait voyager dans tous les sens du terme ; et elle est implacable lorsqu’elle nous dresse le bilan actuel de ce qu’est devenue la route 66.

Car l’histoire débute elle aussi sur ce double 6, en 1966, en Oklahoma, par un massacre sauvage. Desmond Blur en porte encore des séquelles physiques (il avait 8 ans lorsqu’il a affronté le meurtrier et s’en est miraculeusement réchappé) et morales (sa petite sœur a été tuée devant lui, sa mère s’est laissé ensuite peu à peu mourir de chagrin et son père s’est éloigné). 
De cette tragédie passée, Desmond en a fait sa force et il est devenu un professeur émérite en criminologie. Le décès de son père et la rencontre avec Lola Lambert vont bouleverser sa destinée et réveiller les souvenirs.

Lola Lambert, c’est cette Française qui s’est embarquée sur la route 66 afin de retrouver son mari, Pierre, qui a disparu. Il s’est mystérieusement volatilisé sur cette même route un an auparavant. Et si Lola s’est envolée pour l’Amérique en compagnie de ses deux enfants, c’est suite à la réception d’un cahier manuscrit que lui a fait parvenir son mari. Le contenu de ce cahier est effarant : il consigne les mémoires d’un tueur en série qui aurait sévi pendant près de cinquante ans sur tout le trajet de la 66.

Problème ? Lola et sa fille profitent de ce voyage pour alimenter un blog relatant les différentes étapes de leur périple, mais aussi dévoilant les faits sordides survenus à chacun de ces endroits, épisodes tirés du manuscrit écrit par Pierre (imaginaire ou testamentaire ?)

Sophie Loubière nous dresse le portrait de ses protagonistes avec beaucoup de justesse.
Au fil des pages, ils prennent vie et nous deviennent familiers.
Quant à l’intrigue elle-même, bien que l’on se doute très vite que les deux drames sont forcément liés, le mystère reste omniprésent au point qu’il me tarde de lire la suite de cet opus dans un second roman « White coffee ».

Je suis admirative du style de cette auteure qui se montre très pointilleuse dans la réalité de ce qu’elle décrit, vraiment habile dans la technique qu’elle utilise pour construire son scénario, et profondément sensible pour dégager l’humanité très présente dans ses personnages.

JE RETIENS: Waouh! Quel suspense! Quel voyage!
J'OUBLIE: Il m'a fallu un peu de temps pour apprécier les extraits d'horoscope en anglais au début de chaque chapitre.

Le saviez-vous?
Quelle est l'origine du nom de la "Route 66"?

Au dix-neuvième siècle, aucune route ne traverse encore les États-Unis de part en part. 
Il faut parfois plus d'une année pour traverser le pays. Ce sera d'abord le chemin de fer qui reliera le pays. En 1869 est inaugurée la première liaison ferrée transcontinentale. 
Au début du vingtième siècle, le rail connait son apogée, il faut alors deux jours et trois nuits pour rejoindre Los Angeles au départ de Chicago.

Le président Wilson jette, en 1916, les bases d'une véritable politique nationale des transports. Le Federal Highway Act dresse les premières lignes d'un réseau inter-état. Il inclut la création de la première route transcontinentale de la planète qui traversera huit états et désenclavera la très prospère Chicago. Le chantier colossal est confié à un entrepreneur de Tulsa en Oklahoma, Cyrus Avery. Le projet de ce qui deviendra la Route 66 nait officiellement en 1926. Pour limiter les coûteux chantiers de génie civil, elle suit essentiellement l'itinéraire déjà tracé du chemin de fer.

Lorsque l'Interstate Highway System commence à élaborer la première grille de numérotation des routes en 1926, elle la compose d'un ordre croissant d'ouest en est et du sud au nord, les routes impaires suivant un axe nord-sud et les routes paires est-ouest.
 Ainsi, la Route 66 aurait dû s'appeler « Route 60 »... mais le nom était déjà pris par une route traversant les États du Kentucky et de Virginie. On hésita un moment avec « Route 62 » mais Cyrus Avery se décida finalement pour « 66 » qui sonnait bien, avec son double « 6 ».

Première route goudronnée traversant un continent de part en part, la Route 66 restera durant soixante ans l'unique route transcontinentale d'Amérique, la voie qui ouvrira les portes de l'Ouest avec ses rêves, ses espoirs et ses désillusions.

Alors pourquoi Route 66 et pas Road 66 ?  
« Route », en version américaine, cela signifie « itinéraire ».
 C’est donc l’itinéraire 66.

Dans son célèbre romanLes Raisins de la colère
John Steinbeck la baptisera 
The Mother Road (la « route-mère »).

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